LA 5G attendra encore quelques temps

Après Martin Bouygues, c’est au tour de Grégory Rabuel (SFR) de s’interroger sur l’urgence du déploiement de la 5G. Les enchères sont prévues pour septembre 2020 car l’Etat français a besoin d’argent. Les opérateurs nationaux ne remettent pas en cause le calendrier. Néanmoins, ils semblent perplexes quant à la valeur ajoutée à court terme de la 5G. Au-delà des investissements colossaux nécessaires au déploiement de cette technologie, le vrai frein à l’expansion de la 5G réside en l’absence de business cases crédibles. En 3 points, voici pourquoi la 5G attendra encore quelques années avant d’être commercialisée.

« La 5G est la cinquième génération des standards en matière de télécommunications mobiles. La 2G a permis l’essor du portable, la 3G celui des smartphones et des réseaux sociaux, et enfin la 4G a apporté des débits plus importants et a mis le format vidéo dans nos terminaux » Achour Messas

La 5G vise à connecter les objets (industrie 4.0, véhicules, médecine, bâtiment….) à internet. Parmi les apports technologiques de la 5G, nous aborderons 3 caractéristiques de cette nouvelle technologie : l’edge computing, l’ultra haut débit et l’IOT massif.

Sommes-nous prêts pour ce bond technologique ?

L’edge computing consiste à déployer des serveurs au plus proche des utilisateurs afin de créer une architecture « décentralisée ». Le but de l’edge computing est de diminuer le temps de traitement et la quantité de données transportées. Cette faible latence, inférieure à la milliseconde, est un élément fondamental pour le déploiement industriel de la voiture autonome par exemple : l’infrastructure routière et les véhicules communiquent en temps réel. Les temps de communication sont aussi rapides que possible. La 5G est très probablement la réponse technologique à ce problème.

Néanmoins, un automobiliste quittant Lille peut demander à son véhicule de le conduire à Marseille, Brest ou Strasbourg, ce qui signifie que l’ensemble du trajet doit être couvert par le réseau 5G sans aucune zone blanche. Or, en 2020, si 99% de la population est couverte par la 4G, seulement 80% du territoire est couvert par la technologie 5G (source : données opérateurs). Pour rappel, le déploiement de la 4G a démarré en 2008. Le véhicule autonome pourra-t-il donc être déployé à large échelle sans réseau 5G ? Ou bien faut-il attendre l’industrialisation du véhicule autonome pour déployer un réseau national 5G ? Toute ressemblance avec la vielle histoire de la poule et de l’œuf n’est pas fortuite.

Des uses cases grand public peu convaincants

Depuis la fin de l’année 2019, Orange et la SNCF expérimentent l’ultra haut débit grâce à une installation 5G dans la bande des 26GHz en gare de Rennes. Cette expérimentation utilise des terminaux Sony supportant ces nouvelles fréquences. Ces dernières permettent d’augmenter fortement les débits de données, au détriment de la portée des ondes radios. Ainsi, ce réseau expérimental a une portée de 10 à 20 mètres, obligeant l’utilisateur à se placer à proximité de l’antenne relais. La SNCF souhaite tester le téléchargement de contenus multimédias avant l’accès aux trains afin de ne pas saturer le réseau Wifi. Nous faisons un bond en arrière : retour en 1991 lorsqu’il fallait se placer à proximité d’une borne bi-bop pour pouvoir téléphoner.

Des milliers d’objets connectés par km² ?

L’IoT massif n’est pas une priorité pour les opérateurs car d’autres technologies existent afin de connecter des objets à internet. Le wifi et le bluetooth sont particulièrement connus, mais d’autres technologies plus matures sont utilisées pour connecter des compteurs d’eau ou des conteneurs à déchets à internet. Ces technologies LPWAN s’appellent LoRa, SigFox, NB-IOT… L’alliance LoRa revendique 137 opérateurs de réseaux publics dans 157 pays.

Retrouvez notre article dédié à ces technologies LPWAN en cliquant ici

La 5G manque encore de vrais business cases, il est probablement urgent d’attendre. Concernant l’IoT, les opérateurs historiques sont concurrencés par des réseaux privés, déployés par des intégrateurs ou des collectivités locales. Dans un contexte où l’ensemble de la population est confrontée aux enjeux de la transition énergétique et climatique, il y a probablement mieux à faire que de déployer une 5ième génération de télécommunication mobile qui sera sans nul doute encore plus énergivore que la 4G. Enfin, bien qu’encore dans les cartons, cette nouvelle technologie mobilise de plus en plus d’opposants. La 5G effraie et il faudra sans doute plus que des promesses afin d’apaiser les craintes des détracteurs.